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Dans
l’intention affichée, il s’agissait de rendre
hommage à ceux qui ont laissé leur vie ou leur jeunesse
dans cette aventure libératrice. Mais ceux là, qui
étaient-ils ? De bonne foi, nul ne peut l’ignorer :
l’Armée d’Afrique en majorité, c’est-à-dire
les Européens d’Afrique du Nord et quelques évadés
de France, avec des musulmans volontaires de ces territoires, et
des forces gaullistes très minoritaires, auquel se joignait
un fort contingent de troupes coloniales , le tout soutenu par des
parachutistes américains et par la logistique US. La campagne
était facilitée par les renseignements fournis par
la Résistance.
On a coutume, dans les pays civilisés, de
confondre dans un hommage commun tous les hommes tombés pour
la même cause, et il est clair qu’en exclure une partie
à raison de leur origine constitue une démarche assimilable
à du racisme. Or, qu’avons nous vu et entendu ? Un
président de la République recevant et décorant,
à juste titre, des anciens combattants venus d’Afrique
pour la circonstance, sans qu’un seul Français soit
honoré, sans que, dans le flot des discours officiels, le
nom de « Français d’Algérie » apparaisse
une seule fois. Peut on rappeler pourtant que ces Français
oubliés représentaient 176 000 hommes, 21 classes
d’age et 16,40 % de la population de recrutement, le chiffre
le plus fort jamais relevé en France ?
Mais il y a pire que ce racisme délibéré.
A ces cérémonies frelatées étaient invités
les chefs d’États dont les territoires, français
à l’époque, avaient fourni des contingents au
corps expéditionnaire; chefs d’États dont pas
un seul, d’ailleurs, n’avait participé à
ces opérationsça ne mange pas de pain. Le hic, c’est
que l’invité vedette était le garçon
de bains d’Oujda déguisé en président
de la république algérienne, le barbaresque Bouteflika,
l’homme du FLN dont les égorgeurs avaient pour cible
prioritaire ces anciens combattants de l’Armée d’Afrique
qu’on prétendait lui faire honorer ce jour là
l’homme qui avait insulté la France et ses Harki au
parlement et à la TV française. Pourtant, trop, ce
n’est jamais trop il a fallu l’indécente bouffonnerie
d’une remise de la Légion d’Honneur à
la ville d’Alger pour mettre un comble à l’équivoque,
puisque rendre hommage à la ville française de 1943
ne pouvait en rien concerner le président de l’Algérie
indépendante de 2004.
En somme, Chirac a réussi le singulier exploit
de transformer en insulte un éclatant hommage. Non sans remous
d’ailleurs, puisque à partir des premières protestations,
la décision fut prise de transformer la cérémonie
en revue navale, on n’est jamais trop prudent ! Ladite cérémonie
, c’est le moins qu’on puisse en dire, ne s’est
guère déroulé dans la sérénité
: absence des chefs d’États européens invités,
de quelques Africains retenus par leurs coups d’État
ordinaires, polémiques dans la Presse. Et ces maudits «
rapatriés » qui s’en mêlent mais pour eux,
on a vite trouvé des solutions : black-out absolu, d’abord,
et, comme on a ignoré les morts, on va ignorer les vivants.
Plus ingénieux encore, on va monter en épingle les
protestations des Harki, ce qui permet de régner en divisant,
et de montrer qu’on n’est pas raciste... |