Rapport portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français Rapatriés projet de loi n°1499 , ouverture d'un droit en faveur des harkis entre la revalorisation , aides au logement en faveur des harkis.
 
 
Article 2
Ouverture d'un droit d'option en faveur des harkis entre la revalorisation
de l'allocation de reconnaissance et le versement d'un capital
Cet article ouvre aux harkis, membres des formations supplétives et assimilés, le droit à bénéficier soit d'une augmentation du montant de l'allocation de reconnaissance instituée par l'article 67 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1576), soit - en lieu et place de cette allocation - du versement d'un capital dont le montant est fixé à 30 000 euros.
L'allocation de reconnaissance est le dernier maillon d'un dispositif créé par l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1999 du 30 décembre 1999 (n° 99-1173) sous la dénomination de rente viagère. Initialement, cette rente, dont le montant avait été fixé à 9 000 francs (1 372 euros) était non réversible et son versement soumis à des conditions de ressources particulièrement strictes puisque les revenus du bénéficiaire ne devaient pas excéder le montant du minimum vieillesse.
L'article 61 de la loi de finances rectificative pour 2000 du 30 décembre 2000 (n° 2000-1353) et l'article 67 de la loi de finances rectificative pour 2002 du 30 décembre 2002 (n° 2002-1576) sont ensuite venus assouplir le dispositif : le premier en permettant qu'en cas de décès de son titulaire la rente soit reversée à son conjoint ou son ex-conjoint non remarié ; le second en supprimant la condition de ressources, en indexant le montant de la rente viagère, devenue allocation de reconnaissance, sur le taux d'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation de tous les ménages (hors tabac) et en exonérant l'allocation de l'impôt sur le revenu.
De sorte que les caractéristiques de l'allocation de reconnaissance sont désormais définies comme suit. Peuvent y prétendre les personnes de nationalité française âgées de plus de soixante ans et domiciliées en France et qui répondent aux critères suivants :
- soit avoir servi en Algérie dans une des formations supplétives suivantes : harka, groupes d'auto-défense, maghzen, groupes mobiles de sécurité (y compris les groupes mobiles de police rurale et les compagnies nomades), auxiliaires de gendarmerie, sections administratives spécialisées et sections administratives urbaines ;
- soit avoir appartenu à l'une des catégories suivantes : les agents contractuels de police auxiliaire, les agents temporaires occasionnels de police (ATO), les gardes champêtres en zone rurale, les agents de renseignement (dont l'activité est justifiée par l'autorité militaire sous les ordres de laquelle ils étaient placés), les auxiliaires médico-sociaux des armées, les Français rapatriés originaires d'Afrique du Nord anciens militaires ayant appartenu aux forces régulières françaises et participé aux opérations de maintien de l'ordre en Algérie mais ayant quitté l'armée avant quinze ans de services à l'exclusion de ceux qui ont effectué leur seul service militaire obligatoire dans les unités régulières.
Au 1er janvier 2004, le montant de l'allocation a été fixé à 1 830 euros par an. Celle-ci est versée, selon les chiffres fournis par la Mission interministérielle aux rapatriés (MIR), à 11 000 personnes (9 000 harkis et 2 000 veuves) pour un coût annuel de 21 millions d'euros.
La mesure envisagée par l'article 2 vise donc soit à augmenter de plus de 50 % le montant actuel de l'allocation en maintenant à l'identique toutes ses autres caractéristiques (notamment l'indexation de son montant sur l'inflation), soit à lui substituer un capital.
Un décret en Conseil d'Etat fixe le délai imparti pour exercer le droit d'option ainsi que l'échéancier des versements, lequel tient compte de l'âge des bénéficiaires. En cas d'option pour le capital et dans l'attente de son versement, l'allocation continuera à être versée à son titulaire au taux en vigueur au 1er janvier 2004.
D'emblée, il est à remarquer que cette disposition ne rencontre pas pleinement les attentes de la population harkie. Cette dernière considère en effet que la rente viagère devenue allocation de reconnaissance constitue un acquis social sur lequel il ne peut être revenu. A ce titre, elle désapprouve l'alternative qui lui est présentée et réclame à la fois le maintien de l'allocation et le versement d'un nouveau capital. De fait, une partie des représentants des harkis estime que les deux allocations en capital qui leur ont déjà été servies - la première d'un montant de 60 000 francs (9 147 euros) créée par la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés, la seconde d'un montant de 110 000 francs (16 769 euros) instituée par la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie - ne suffisent pas à réparer le préjudice qu'ils ont subi et notamment la perte de leur « toit ».
Aussi, serait-il souhaitable de modifier l'architecture du dispositif tel qu'il est présenté dans le projet de loi et de l'enrichir de façon à laisser au rapatrié harki le choix entre trois options :
- le maintien de l'allocation de reconnaissance dont le montant est porté à 2 800 euros par an ;
- le versement, en lieu et place de l'allocation de reconnaissance, d'un capital de 30 000 euros ;
- le maintien de l'allocation de reconnaissance au taux en vigueur (1 830 euros) et le versement d'une dotation en capital d'un montant de 20 000 euros.
Outre qu'il répond mieux aux attentes des harkis, ce nouveau dispositif a l'avantage de se révéler budgétairement neutre puisque son coût n'excède pas la fourchette haute de l'enveloppe budgétaire consacrée à l'application de l'article 2 dans sa rédaction actuelle, soit 776 millions dans l'hypothèse la plus coûteuse (le choix par tous les harkis de la revalorisation de l'allocation).
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à indemniser plus largement les sacrifices subis par les familles harkies en portant notamment le montant de l'allocation de reconnaissance mentionnée à l'article 67 de la loi de finances rectificative pour 2002 à 2 800 euros à compter du 1er janvier 2005.
Le rapporteur s'est déclaré défavorable à l'amendement, relevant que l'amendement suivant, dont il est l'auteur et qui bénéficie du soutien du gouvernement, lui donne en partie satisfaction. La commission a rejeté l'amendement.
La commission a examiné deux amendements en discussion commune, le premier du rapporteur et le second de M. Francis Vercamer, visant tous deux à améliorer le dispositif de l'allocation de reconnaissance en faveur des harkis.
Le rapporteur a souligné l'importance de son amendement qui donne satisfaction aux harkis, en leur permettant de bénéficier tout à la fois du maintien de l'allocation de reconnaissance et du versement d'un capital de 20 000 euros.
M. Alain Néri a précisé que cet amendement est moins avantageux que celui qui avait été présenté par son groupe mais qu'il voterait en sa faveur comme solution de repli.
M. Francis Vercamer a considéré que son amendement (lequel répond à une promesse faite aux harkis par M. Jacques Chirac dès 1991), qui accorde à chaque harki une indemnisation en capital d'un montant de 55 000 euros, est plus favorable que celui présenté par le rapporteur. Pour solder ce dossier, il conviendrait donc de respecter les termes de la promesse faite par le Président de la République.
Le président Jean-Michel Dubernard a considéré l'amendement du rapporteur comme juste et équitable.
La commission a adopté à l'unanimité l'amendement du rapporteur. En conséquence, l'amendement de M. Francis Vercamer est devenu sans objet.
La commission a examiné un amendement de M. Michel Heinrich, défendu par Mme Cécile Gallez, permettant aux femmes divorcées de harkis de bénéficier de l'allocation de reconnaissance.
Après avoir souligné qu'une pension de réversion existait déjà pour le ou les conjoints survivants, au prorata des années de mariage, et que pour le reste l'allocation est attachée à la personne du harki, le rapporteur a émis un avis défavorable.
La commission a rejeté l'amendement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission a ensuite rejeté un amendement de M. Michel Heinrich, défendu par Mme Cécile Gallez, prévoyant que les rapatriés retraités militaires ayant effectué plus de quinze ans de service peuvent prétendre à l'allocation de reconnaissance.
Puis, la commission a examiné un amendement du rapporteur tendant à accorder aux enfants orphelins de harkis - et sous certaines conditions - une allocation forfaitaire de 20 000 euros à répartir à parts égales entre les membres de la fratrie, sauf dans le cas où les orphelins sont reconnus pupilles de la Nation, auquel cas leur est octroyée une allocation d'un montant de 20 000 euros chacun.
Le rapporteur a souligné combien il est important que les parlementaires soutiennent cet amendement qui est susceptible d'être frappé d'irrecevabilité financière et qui n'a pas encore reçu l'accord du gouvernement.
La commission a adopté l'amendement.
La commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant l'insaisissabilité et l'exonération de tous impôts et taxes des indemnités versées en capital aux harkis et à leurs enfants orphelins en application de l'article 2 du présent projet.
La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.
Après l'article 2
Après que le rapporteur a précisé que cet amendement est satisfait, la commission a rejeté un amendement de Mme Geneviève Lévy prévoyant que les pupilles de la Nation rapatriés victimes de guerre peuvent bénéficier de la même réparation que les harkis de la première génération.
Puis, la commission a examiné en discussion commune trois amendements de M. Alain Néri visant à instaurer, selon des modalités différentes, une allocation forfaitaire annuelle au profit des enfants de harkis.
M. Alain Néri a précisé que ces amendements viennent réparer la situation difficile qui a été faite aux enfants de harkis dans les camps d'hébergement temporaire. Les conditions de vie ont rendu difficile leur scolarité et leur formation et, par suite, leur insertion dans la vie professionnelle et dans la société. C'est la raison pour laquelle il est souhaitable de les faire bénéficier d'une allocation forfaitaire annuelle lorsqu'ils ont transité au moins trois ans par ces camps. M. Alain Néri a ensuite indiqué que ses deux autres amendements sont des amendements de repli restreignant le périmètre d'éligibilité à l'allocation aux enfants de harkis non imposables et aux enfants de harkis allocataires sociaux.
Le rapporteur a souligné l'incontestable générosité du dispositif mais il a estimé que celui-ci est contraire à l'esprit du texte dans la mesure où il crée en faveur des harkis de deuxième génération des droits nouveaux dérogatoires du droit commun. Répondant à l'objection de M. Alain Néri, qui a évoqué les initiatives précédentes du rapporteur allant dans le sens de la générosité, il a précisé qu'il est possible dans certains cas - mais pas en l'espèce - de réconcilier le coeur et la raison.
Le président Jean-Michel Dubernard a par ailleurs rappelé la contrainte que représente l'article 40 de la Constitution pour un pareil dispositif et la nécessité de s'y conformer.
La commission a rejeté les trois amendements.
La commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer tendant à accorder à titre d'indemnisation aux enfants de la deuxième génération ayant vécu dans les camps, une allocation forfaitaire.
Le rapporteur s'est déclaré défavorable à cet amendement car le projet de loi ne doit pas accorder d'avantages spécifiques et dérogatoires du droit commun aux harkis de la deuxième génération.
La commission a ensuite examiné un amendement de M. Yvan Lachaud visant à accorder aux supplétifs de souche européenne la possibilité de se voir attribuer l'allocation de reconnaissance.
M. Alain Néri a soutenu cet amendement au motif qu'il rendrait justice à des personnes - très peu nombreuses - qui se sont dévouées pour la nation française et dont l'engagement n'a jamais été reconnu.
Le rapporteur a émis un avis défavorable estimant que la situation des « harkis européens » ne peut pas être assimilée à celle, spécifique, des harkis musulmans et ce même si ces deux populations ont vécu un véritable traumatisme à leur retour en Europe.
La commission a rejeté cet amendement.
Article 3
Prorogation des aides au logement en faveur des harkis
Cet article proroge de cinq ans, jusqu'au 31 décembre 2009, le délai durant lequel les harkis pourront déposer un dossier de demande d'aide au logement, délai dont la limite était initialement fixée au 31 décembre 2004.
Trois types d'aide spécifique de l'Etat au logement en faveur de la population harki ont été mis en place par la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie :
- une aide à l'acquisition de la résidence principale d'un montant forfaitaire de 12 196 euros (article 7) ;
- une aide à l'amélioration de la résidence principale réservée, aux personnes propriétaires occupants leur résidence principale et non imposables sur le revenu (article 8) ;
- un secours exceptionnel, accordé au titulaire ou à son conjoint survivant, destiné à permettre la résorption d'un surendettement consécutif à une opération d'accession à la propriété d'une résidence principale réalisée avant le 1er janvier 1994 (article 9).
A l'exception du secours exceptionnel, ces aides de l'Etat sont cumulables avec toute autre forme d'aide prévue par le code de la construction et de l'habitation.
Toutes trois confondues, ces aides, dont la création répondait à la revendication des harkis pour retrouver le « toit » qu'ils avaient abandonné en Algérie, ont profité à 7 245 harkis pour un montant total de 37,8 millions d'euros. Leur prorogation devrait permettre aux 45 % de familles de harkis qui ne sont pas encore propriétaires de leur logement de le devenir et à ceux qui le sont déjà de conserver la propriété de leur toit.
Toutefois la question de l'effectivité d'une telle disposition doit être posée. En raison de leur âge, de nombreux harkis ne peuvent plus souscrire de prêt auprès des établissements bancaires de sorte que la réouverture du droit à une aide au logement risque fort de s'avérer de nul effet, du moins pour ce qui concerne l'aide à l'acquisition de la résidence principale.
Pour contourner cette difficulté, le rapporteur propose que le bénéfice de l'aide à l'acquisition de la résidence principale, telle que définie par l'article 7 de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie, soit étendu aux enfants des bénéficiaires lorsque ceux-ci hébergent leurs parents.
Un tel dispositif a deux avantages. D'une part, il s'inscrit complètement dans la logique de l'article 3 du projet de loi, qui est de permettre à chaque rapatrié harki de disposer d'un « toit » dont il serait le propriétaire. D'autre part, tout en parvenant à cet objectif, le dispositif envisagé ne crée pas de nouveau droit pour la seconde génération de la population harkie dans la mesure où le bénéfice de l'aide demeure directement attaché à la personne du « harki » tel qu'il est juridiquement défini par le premier alinéa de l'article 9 de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés complété pour sa mise en oeuvre par la circulaire du 5 septembre 1989 relative à la politique en faveur de l'intégration des rapatriés d'origine nord-africaine.
La commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer tendant à accorder aux harkis une aide financière pour acquérir leur résidence principale en raison des difficultés d'accès au crédit, après que le rapporteur a indiqué que son prochain amendement permettrait de répondre à cette préoccupation.
La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur permettant d'étendre le bénéfice de la mesure d'accession à la propriété inscrite à l'article 7 de la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 aux logements acquis par des harkis en indivision avec leurs enfants.
La commission a ensuite adopté l'article 3 ainsi modifié.
Après l'article 3
La commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer instituant une allocation forfaitaire attribuée aux enfants de harkis souhaitant réaliser une opération d'accession à la propriété, après que le rapporteur a expliqué que l'amendement précédent répond partiellement à ce problème et qu'en tout état de cause il n'est pas souhaitable de créer des droits nouveaux et dérogatoires du droit commun en faveur des harkis de la deuxième génération.
La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Francis Vercamer tendant à accorder aux enfants de harkis le bénéfice de prêts à taux zéro, le rapporteur s'étant déclaré défavorable pour les mêmes raisons que celles évoquées à propos de l'amendement précédent.
La commission a rejeté un amendement de M. Francis Vercamer visant à accorder une allocation forfaitaire pour les harkis réalisant des travaux d'amélioration de l'habitat dans la résidence principale dont ils sont propriétaires, après que le rapporteur a indiqué qu'un tel dispositif existe déjà.
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