A Nice, une stèle érigée pour apaiser l'amertume des rapatriés et des harkis après l' érection d'une statue du général de Gaulle le 18 juin 2011.

 

Cinquante ans après la fin de la guerre d'Algérie, la ville de Nice a inauguré le 30 juin 2012, sur la promenade des Anglais, face à la Méditerranée, une stèle dédiée aux Français d'Afrique du Nord de toutes confessions.

Cette stèle, une dalle de marbre brisée qui symbolise la déchirure douloureuse entre les Français de l'époque, répond en partie aux vives critiques adressées le 18 juin 2011 par la communauté pied-noir qui s'était indignée que soit alors inaugurée par le maire (UMP) Christian Estrosi une statue du général de Gaulle sur une place sur une place éponyme.
Il existe déjà à Nice, square Alsace-Lorraine, un monument commémoratif "à ceux qui sont morts pour l'Algérie française", leur "pays perdu", mais "le Mémorial du cinquantenaire" inauguré le samedi 30 juin 2012 rend hommage aux vivants.

Sur la dalle de marbre bleu foncé figurent trois dates: 1830, 1962 et 2012, en référence à la conquête de l'Algérie, à son indépendance et à l'érection de la stèle, elle est l'oeuvre de Roland Moreau.
Un court texte rend en outre "hommage" aux Francais d' Afrique du Nord de toutes confessions.
Ils ont construit un pays, l'ont quitté dans la douleur en 1962. Arrivés en nombre sur la Côte d'Azur, ils ont participé à son essor et à sa réussite. Ne sont pas oubliés les Français du Maroc et de la Tunisie."

La cérémonie s'est déroulée devant quelques associations de Français d'Algérie ralliés au Gaulliste Christian Estrosi et son complice Eric Ciotti.

Idolâtre Christian Estrosi devant la statue de de Gaulle
 
« Hommage aux Français d'Afrique du Nord de toutes confessions », dit l'inscription principale. La suite du texte dit : « Ils ont construit un pays, l'ont quitté dans la douleur en 1962... » Sans mentionner nulle part l'Algérie. Il est stipulé en dernier paragraphe : « Ne sont pas oubliés les Français du Maroc et de Tunisie. »

Discours du Maire de Nice le Gaulliste Christian Estrosi


» Ce jour, je le ressens intensément. Ce jour est celui d’une communion profonde dans le souvenir d’une Histoire douloureuse.
Ce jour est celui de la vérité renaissante, soulevant le poids de l’oubli et du mensonge. Et de ce jour, rassasiés de justice et de souvenir, nous poursuivrons ensemble notre chemin, celui de Nice Côte d’Azur, celui des Alpes-Maritimes, celui de notre pays.

Inauguration stèle Hommage aux Français d'Afrique du Nord à NiceL’œuvre dédiée à tous les Français de l’autre Rive que nous venons d’inaugurer subsistera aussi longtemps que la Mémoire. Elle la vivifiera. Elle sera la référence d’Andréa, d’Alexi, de Justin qui symbolisent aujourd’hui la force de l’espoir et la fierté du passé. Car cette création artistique est le témoignage permanent de notre reconnaissance et le garant de l’intégrité du Souvenir que nous honorons aujourd’hui.

Roland Moreau, merci pour la qualité de votre inspiration, la pureté du geste que vous avez choisi, votre capacité à saisir et à représenter » la déchirure » en même temps que le présent reconstruit. Vous avez voulu qu’entre deux blocs de granit, l’horizon méditerranéen trace une barre symbolisant le lien qui façonne la première lettre du mot Harki, en un appel silencieux et pérenne à cette communauté qui nous est si chère. Votre naissance et votre jeunesse à Oran ont forgé en vous l’attachement à la terre natale, l’ancrage viscéral aux paysages, aux plages, aux amis de là-bas, et cette remarquable faculté d’intégration au sein de notre ville, où l’Histoire vous a contraint à poser vos 17 ans. Et merci pour ces pas gravés ! Dans une histoire en marche, ils laissent des empreintes tournées vers l’avenir, à nouveau pétries de cette force de conviction et de cette volonté qui caractérisent le peuple pied-noir.

Souvent dispersés et séparés, parfois mal accueillis alors qu’ici les Niçoises et les Niçois furent exemplaires, faisant face à de nombreuses difficultés de tous ordres, le chagrin silencieux, la colère et le désespoir rentrés, vous tous, pieds-noirs et harkis, avez su édifier de nouvelles existences et forger de nouveaux destins. Ce que vous montrez avec talent, Roland Moreau, c’est que l’exode, aussi cruel fut-il, aussi précipité, improvisé et mal encadré s’imposa-t-il, marqua aussi un nouveau départ. Dans un temps de paradoxes, dans la douleur, l’exode fut aussi, pour la plupart, le début d’une reconstruction couronnée par les succès et par l’estime de tous, celle des autres et celle de soi.

Il y a ce que ce monument symbolise.

Mais ce monument est aussi lié à ce magnifique espace.Notre Mémorial, je dis bien » notre « , se dresse de manière emblématique face à la Méditerranée, à l’aplomb du Centre Universitaire Méditerranéen liant Nice-Côte-d’Azur à cet espace maritime et côtier qui est le berceau de nos civilisations. D’autres emplacements étaient envisageables, parfois plus retirés ou moins accessibles. Je n’ai pas hésité : pour son implantation, il fallait un lieu qui soit visible de toutes et de tous, aussi marquant que votre action ici depuis cinquante ans. Il fallait un lieu qui symbolise votre formidable talent, ajouté à tous les talents qui depuis vingt-cinq siècles façonnent cette terre. A l’aplomb de cette Maison des traditions et des cultures méditerranéennes, sur la voie la plus célèbre de notre ville, oui l’œuvre de Roland Moreau est à sa place! Car je n’oublie pas qu’à partir de 1960 sont arrivés à Nice des familles désemparées mais courageuses. Elles n’avaient pour richesse que les liens forgés là-bas et la volonté de préserver les êtres qu’elles aimaient.
C’est pourquoi j’ai voulu qu’ici et en ce jour, dans ce Centre Universitaire Méditerranéen porteur à la fois d’Histoire et d’Avenir, de jeunes descendants de Harkis et de Rapatriés soient présents. Andrea, Alexi et Justin incarnent les différentes périodes de la jeunesse, de cette volonté admirable de mettre leurs pas dans le parcours de vos vies. Ils symbolisent le soleil des cœurs et l’espérance vive des combats gagnés sur l’ingratitude subie.

Oui, vous avez souffert, oui vous avez été arrachés à cette terre que vous aimiez tant, qui était la France, et oui, vous restez des patriotes.

Je veux le dire à Andréa, Alexi et Justin, à tous vos enfants et petits-enfants, je veux l’affirmer en remerciement à vos parents, je veux le graver en mémoire de vos défunts : je suis fier de vous. Qui dira la chronique des efforts accomplis sous le soleil, le dur labeur des champs, les relations familiales, amicales, tissées au quotidien avec celles et ceux qui sont demeurés là-bas et auxquels, je le sais, vous songez avec un amour filial ?

C’est en pensant à eux que j’ai décidé la participation active de la Ville de Nice, à hauteur de 60 000 euros, à la réfection des cimetières de Français en Algérie. Toute ma reconnaissance va au Comité de Sauvegarde des Cimetières de l’Oranie, subventionné par la Ville de Nice, pour la remarquable restauration des carrés juifs et chrétiens sur le site d’Aïn Temouchent. Le respect de vos défunts mérite l’investissement de la Collectivité, particulièrement lorsqu’il est prolongé par un fort engagement associatif. C’est en pensant à ces femmes et à ces hommes que j’ai décidé que le premier des six colloques de cette année du Cinquantenaire à Nice serait dédié à l’histoire des populations françaises et européennes en Méditerranée, car oublier leur génie reviendrait à nier la vérité. Et qui dira la fraternité réelle, le compagnonnage des êtres de toutes conditions, la compréhension réciproque et les centres d’intérêts partagés, le respect mutuel entre les communautés, les affinités, les enthousiasmes communs ?

C’est parce que cette communion existait et doit continuer d’exister que j’ai souhaité que les dignitaires religieux soient à nos côtés aujourd’hui, et je remercie les représentants des grandes confessions qui siègent au sein d’Alpes-Maritimes Fraternité de s’être joints à nous. Le culte catholique sera célébré à Cimiez, solennellement. Autour de l’Eglise catholique, vous vous êtes souvent réunis comme en famille, et la fidélité aux grandes figures mariales, comme Notre-Dame de Santa-Cruz, forme une part inoubliable de votre mémoire.

La communauté juive se réunira aussi, dans la prière.

Je sais l’importance de la population rapatriée parmi la communauté juive niçoise, azuréenne et nationale, dont les liens de proximité avec les autres religions se bâtissent au quotidien, y compris dans les moments les plus difficiles et les plus douloureux. Mais je récuse l’idée d’une juxtaposition de communautés, alors que vous vivez, que nous vivons une histoire commune. C’est pourquoi je veux dire ma fierté que la Maison communale des associations de Rapatriés et de Harkis, que nous avons inaugurée ensemble rue Bavastro voici un peu plus de deux ans, soit devenue le lieu de vos réunions, de vos rendez-vous, de vos moments de convivialité. Vous y êtes et y serez toujours chez vous, à proximité immédiate de la Méditerranée, dans ce quartier du Port de Nice qui est une belle part de la longue Histoire de notre cité, où battent encore le cœur et la langue de cette terre, et dont la rénovation nous tient tant à cœur.

Et si je suis un Niçois issu, comme beaucoup, d’une famille immigrée, comme vous, j’ai l’amour de la Méditerranée et du soleil.
Comme vous, j’ai la passion de l’engagement personnel au service des Autres. Il y a un demi-siècle, il vous fallut monter à la hâte et à contrecœur dans des bateaux et des avions vous séparant pour toujours de votre terre natale. Il vous fallut subir de longs jours d’attente qui faisaient suite à de longs mois d’angoisse. Pendant ces périodes de détonations et de souffrances, d’incompréhensions et de sentiments de trahison, beaucoup ont péri et beaucoup ont senti mourir une partie d’eux-mêmes. Alors oui, je veux dire ici que je fais corps avec ce que vous avez vécu, au même titre que je considère comme exemplaire, dans les situations qui survinrent, cet attachement à la Patrie qui a toujours été le vôtre. L’Histoire vous a conduit à être partie intégrante de Nice qui vous a ouvert les bras. Ici nous construisons ensemble l’avenir des générations présentes et futures. Elles se sentent intensément niçoises mais elles veulent mieux connaître votre parcours. Elles éprouvent ce besoin irrépressible d’être en harmonie avec leurs racines. Car nul ne peut savoir où il va s’il ne sait avec précision d’où il vient. Et c’est en quoi cette année de Cinquantenaire au cours de laquelle nous avons ensemble fait émerger les vérités trop souvent tues, a forgé en moi une certitude. Je veux l’énoncer simplement, avec émotion, en mesurant l’importance et la beauté du chemin parcouru, en regardant avec vous l’horizon de nos territoires, en savourant la victoire chaque jour renouvelée de la vie reconstruite, en cultivant les fruits de l’énergie et de la créativité pour que nos enfants les prolongent.