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Disparus d'Algérie (1954-1962) Collectif de Défense des Familles de disparus attire l'attention des candidats sur les disparus d'Algérie, la réponse de Nicolas Sarkozy
 
 


23 fevrier 2007
Monsieur Nicolas Sarkozy
Candidat à la Présidence de la République française

Monsieur le Ministre,
La Communauté des Rapatriés d’Algérie a été attentive à votre discours de Toulon, pour autant des problèmes demeurent et sont volontairement ignorés depuis 45 ans par les différents pouvoirs qui se sont succédés.
Le 6 février 2007, la France a signé la Convention Internationale sur les disparitions forcées sans que le problème des disparus d’Algérie ne soit évoqués.
Ce texte reconnaît « aux victimes et à leurs proches un droit à réparation ainsi qu’à la vérité » (communiqué du Ministère des Affaires Etrangères 5/02/07)
En tant que fille de disparu du 5 juillet 1962 à Oran et présidente du Collectif des Familles de Disparus durant la guerre d’Algérie, j’aimerai savoir quelles dispositions, dans l’éventualité de votre élection à la Présidence de la République, vous comptez prendre pour régler ce douloureux problème.
Depuis plus de 44 ans, les familles mènent une quête éprouvante pour connaître la vérité sur le sort de leurs disparus ; c’est une des causes de leur désillusion vis à vis de nos gouvernants. En effet,l’accès aux documents du Ministère des Affaires Etrangères et aux fiches de la Croix Rouge Internationale, qui a été autorisé en 2005 ( par dérogation spéciale avec obligation de ne pas divulguer ou de reproduire lesdites fiches) est aléatoire et la liste des disparus comme les renseignements qui
nous sont communiqués sont incomplets.
Les questions au gouvernement, posées part de nombreux députés ou la proposition de commission d’enquête sur le sort des disparus proposée par Jean Marc Roubaud, et signée par plus de 80 députés, font l’objet de réponses évasives ou totalement hors sujet.
- Le 5 juillet 2006 après la marche silencieuse de Marseille, une délégation des familles de disparus a remis une lettre en Préfecture de Marseille à l’intention du Président Jacques Chirac, sans réponse à ce jour.
- Il est absolument indigne d’imposer à ces familles une fin de non recevoir. Il est inacceptable de leur imposer le silence alors que les bourreaux d’hier sont reçus en toute impunité et profitent des largesses e la France.
- Avant tout « devoir de mémoire », il y a d’abord « un travail de mémoire » : des témoins sont encore vivants.
- Le Maroc, l’Argentine, l’Espagne et bien d’autres pays ont fait ce travail en donnant la parole aux victimes.
- C’est ce que nous attendons, depuis 45 ans. Pour qu’un renforcement de la coopération avec l’Algérie soit possible et durable, il faut des bases saines et un respect réciproque des blessures du passé.
La guerre d’Algérie a été une guerre civile dont les Harkis et les Pieds Noirs ont été les boucs émissaires et, malgré leur dizaine de milliers de victimes,
demeurent les grands oubliés de cette tragédie.
C’est la raison pour laquelle, nous vous demandons de mettre tout en œuvre pour que nous accédions à toutes les archives civiles et militaires, Françaises et Algériennes pour connaître enfin le sort de nos disparus. Et que les familles qui le désirent, puissent rapatrier les dépouilles (de nombreux charniers ont été localisés)
Si vous êtes élu Monsieur le Ministre, je souhaite que vous soyez le premier président à rendre leur dignité à ces innocents de tous âges et de toutes confessions et permettre aux familles de retrouver la paix.
En espérant que notre appel conforme aux dispositions de la Convention Internationale sur les disparitions forcées sera entendu et pris en considération, recevez Monsieur le Ministre, l’assurance de ma très haute considération.
Marie Claude Teuma Présidente du Collectif de Défense des Familles de Disparus

 

.Paris, le 03 AVRIL 2007
Chère Madame,

Vous avez souhaité appeler mon attention sur la question douloureuse des personnes disparues pendant la guerre d'Algérie. C'est avec le plus grand intérêt que j'ai pris connaissance de votre courrier, et je vous remercie de m'avoir fait part de vos préoccupations.
Comme vous le rappelez à juste titre, la France vient de signer la Convention internationale pour la protection des personnes contre les disparitions forcées. Jusqu'à présent, la lutte contre ces disparitions se heurtait à un vide juridique: il n'existait tout simplement pas d'instrument international universel qui les interdise et les condamne en toutes circonstances. La France s'honore donc de cet engagement, qu'elle n'aura de cesse de faire respecter.
Je mesure la douleur des familles des victimes, qui restent parfois des années dans l'incertitude, sur le sort de leurs proches. Leur deuil est impossible. Leurs démarches vis-à-vis des autorités pour faire la lumière sur la disparition n'aboutissent que trop rarement.
Les disparitions forcées sont une combinaison de violations de plusieurs droits: droits civils et politiques, droit à la liberté et à la sécurité de sa personne, droit à la vie, droit à l'intégrité physique, et droits économiques, sociaux et culturels. Cette situation particulière a pu entraver leur reconnaissance en tant que violation spécifique des droits de l'homme, et leur traitement efficace par les mécanismes internationaux et les juridictions nationales.
Cette Convention constitue donc un progrès considérable. La France doit aussi aller au bout de son travail de mémoire, pour pouvoir enfin cicatriser les blessures de son passé or la question des disparus de la guerre d'Algérie reste une blessure ouverte pour les familles de victimes, mais aussi pour l'ensemble de la communauté nationale.
Près d'un demi-siècle après les faits, il est grand temps que toute la lumière soit faite sur ces disparitions, que des experts, historiens et chercheurs indépendants puissent véritablement étudier le sort des disparus, et aider ainsi leurs familles à retrouver la paix. Il est grand temps de connaître la vérité historique des faits. Il est grand temps de rendre hommage à ces victimes, et à leurs familles les échos d'un passé dont elles ont été injustement dépossédées.
Je suis favorable à ce qu'un Comité des sages comprenant des scientifiques, des historiens et des représentants des familles établisse enfin une liste officielle des disparus. Et je crois légitime que les disparus aient leur nom apposés sur les lieux publics pour les familles qui le souhaitent.
En espérant que ces précisions répondent à vos attentes légitimes et restant à votre écoute, je vous prie de croire, Chère Madame, en l'assurance de ma considération distinguée.
Nicolas SARKOZY, Candidat à l'élection présidentielle


Madame Marie-Claude TEUMA
Collectif de Défense des Familles de disparus