Tuerie rue Isly du 26 mars 1962 à Alger un carnage dans la foule algéroise : plus de 80 morts et de 200 blessés. Les morts seront « confisqués » pour être enterrés à la sauvette, les meurtriers décorés, l'enquête bâclée en quelques jours. Et le voile de la raison d'État retombera pour toujours sur le drame.
 
     
 


 
     
 
Tuerie du 26 mars 1962 à Alger près de la Grande Poste un carnage dans la foule algéroise : plus de 80 morts et de 200 blessés. Les morts seront « confisqués » pour être enterrés à la sauvette, les meurtriers décorés, l'enquête bâclée en quelques jours. Et le voile de la raison d'État retombera pour toujours sur le drame.
 

Pour le commun des Français, la sanglante fusillade dite de la rue d'Isly, c'est, au mieux, la séquence « subliminale » sauvée d'un reportage filmé, sur fond sonore de coups de feu entrecoupés d'appels angoissés à cesser le feu. On attend toujours, sur ce sujet, le type de « dossier » dont la télévision et les différents médias sont si prodigues à propos de tout et de rien. Téléspectateurs, auditeurs, lecteurs, étudiants qui vous montreriez curieux de ce qui s'est passé le 26 mars 1962 à Alger, on vous le redit, aujourd'hui comme hier :


« Circulez, y'a rien à voir... ».

 
C'est pourtant ce jour-là que, pour la première fois depuis les événements de la Commune de Paris, en 1870, une foule française a été mitraillée par ses propres soldats, sur ordre du sommet de l'État.
L'affaire se situe une semaine après les accords d'Évian qui, en même temps qu'ils consacrent l'abandon des trois départements français d'Algérie au seul F.L.N., sont censés mettre fin aux violences (attentats, meurtres et combats) des sept dernières années. Depuis quatre jours, c'est tout le contraire qui se produit : le quartier populaire de Bab el Oued est l'objet d'un blocus impitoyable des « forces de l'ordre », accompagné de ratissage en règle avec appui aérien et blindé. Plusieurs milliers d'Algérois, alertés par le « téléphone arabe » et obéissant à un élan de solidarité envers leurs concitoyens assiégés et privés de tout, se sont rassemblés sur le Plateau des Glières qui s'étend devant la Grande Poste, pour une marche pacifique sur Bab el Oued. Hélas pour eux, les autorités civiles et militaires du moment ont décidé de briser la manifestation par tous les moyens, « y compris le feu des armes ». Et de fait, c'est un véritable dispositif de guerre qui a été mis en place contre les civils désarmés : gendarmes, C.R.S., troupe du contingent, mais également plusieurs compagnies du 4e Régiment de tirailleurs, rameutées du bled pour tenir le centre d'Alger, en dépit de leur inaptitude à ce type de mission. Leur effectif se compose maloritairement de soldats musulmans qu'on sait inquiets et désorientés par l'évolution des événements et, de ce fait, « travaillés » de près par la propagande F.L.N. Leur présence armée, face à la foule, fait présager le pire et, en effet, le pire se produit. Après quelques minutes de confrontation tendue, le feu (F.M., P.M. et fusils) se déclenche à partir de leur barrage de la rue d'Isly, et, dix minutes durant, fera un carnage dans la foule algéroise : plus de 80 morts et de 200 blessés. Les morts seront « confisqués » pour être enterrés à la sauvette, les meurtriers décorés, l'enquête bâclée en quelques jours. Et le voile de la raison d'État retombera pour toujours sur le drame.