Monsieur Kader ARIF
Ministre délégué auprès du Ministre de la Défense Chargé des anciens combattants 37 rue Bellechasse 75700 PARIS
Marignane, le 22 mars 2013
Monsieur le Ministre,
Le mardi 19 mars 2013 aura été pour Marignane, comme je l'ai voulu, une journée ordinaire.
Une journée sans commémoration nationale, sans Marseillaise et sans salut au drapeau.
En effet, j'ai décidé de ne pas commémorer, en ce jour, la fin de la guerre d'Algérie. Je l'ai décidé en mon âme et conscience de républicain.
Je l'ai décidé en mon âme et conscience de Français et ce au nom de la vérité, du respect et de l'Histoire.
Nous devons la vérité aux Français rapatriés, à nos frères harkis et aux Algériens.
Nous devons la vérité à la France mais le 19 mars n'est pas la vérité et persister dans cette voie, met gravement, en danger l'unité de notre nation.
La vérité se doit d'être transparente et unique, car elle est le socle de l'Histoire de France. C'est cette vérité qui seule peut reconnaître les responsabilités.
C'est cette vérité qui seule peut révéler les drames intimes de nos rapatriés, de nos soldats et de nos frères d'armes harkis.
Ce sont sur les larmes et les souffrances, les cris et les silences de deux peuples, de deux nations, de deux pays que nous devons lever le voile du mensonge.
C'est au nom du respect que nous devons à nos morts et à nos disparus partis après le 19 mars 1962, que je ne peux reconnaître cette date comme étant celle de la fin de leurs souffrances.
Ce respect nous le devons, encore plus intensément, aux vivants qui meurtris à jamais par ce qu'ils ont traversé, hésitent à transmettre leur mémoire, leur histoire à leurs enfants et petits-enfants.
Leur douleur est présente, infinie et toujours aussi vive.
C'est au nom de l'Histoire qui ne peut souffrir d'interprétation politicienne que ce 19 mars 1962 ne peut être le jour où la France peut se rassembler dans un même hommage.
Notre Histoire est écrite avec l'honneur, le combat, le courage, la joie, la peine, la vie et la mort d'hommes et de femmes qui demeurent tous pour la plupart des héros anonymes. Des héros anonymes, certes, mais qui ont fait ce qu'est la France aujourd'hui. Les Français d'Algérie sont, et ce de manière incontestable, de ceux-là.
Il n'appartient pas aux politiciens de décréter, de décider de ce qui sera ou non l'histoire. Nous ne sommes pas des historiens et toute intervention active de notre part dans son écriture reste forcément suspecte car elle peut être nourrie et motivée par des desseins autres que la recherche et le respect de la vérité.
Au risque de perdre leur dignité, les politiques doivent toujours rechercher, exiger et revendiquer le respect de la vérité, pour que notre nation reste unie face à la vraie Histoire. C'est cette union qui permettra, ce que l'on appelle la réconciliation.
La réconciliation et la reconnaissance des responsabilités de l'Etat doivent occuper chacune de nos actions et de nos décisions.
Il est temps, 50 ans après l'exode des Français d'Algérie, que La France, fidèle à ses valeurs, mette tout en œuvre pour être en paix avec les siens, avec sa mémoire comme avec son histoire.
Oui, il est plus que temps que la France se rappelle les paroles de Napoléon:" On ne gouverne pas une nation par des demi-mesures, il faut de la force, de la suite et de l'unité dans les actes publics".
Il n'y a pas de place pour les compromis quels qu'ils soient, qu'ils trouvent leur essence dans les relations diplomatiques ou économiques. Aucun Français vivant, mort ou disparu ne doit être sacrifié sur l'autel de la politique politicienne.
Je ne serai jamais de ceux qui oublient les valeurs de la République.
Je ne serai jamais de ceux qui soldent la France au nom de je ne sais quelle ambition politique et personnelle.
Je suis de ceux pour qui l'unité de la France trouve son fondement dans la vérité. Je suis de ceux pour qui la dignité de la France a un sens, celui de la responsabilité.
Monsieur le Ministre, l'avenir de nos enfants ne peut se construire sur le mensonge.
Notre pays doit être uni dans la douleur, le souvenir et la vérité.
La vie des Français d'Algérie, le sacrifice de nos combattants, la douleur de nos frères Harkis, le mystère de nos disparus, le souvenir de nos morts le méritent.
Eric LE DISSES
Copie : Parlementaires
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