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En 2003, Alain Marleix proposait
une loi sur le 19 mars 1962

Le 8 novembre 2007 il recommence, dans la séance d'examen à l'assemblée nationale du budget des anciens combattants.

Le 25 novembre il devrait se rendre à l'inauguration du Mur des disparus de Perpignan.

Nous espérons que les dirigeants des principales associations de Rapatriés auront les arguments pour le convaincre de conserver une seule et unique date le 5 décembre de chaque année.



 

Séance du jeudi 8 novembre 2007


M. Georges Colombier  UMP

Lors de la campagne, Nicolas Sarkozy a rappelé qu’il n’était pas question de revenir sur les dates du 11 novembre 1918, du 8 mai 1945, du 18 juin 1940, ni sur les journées commémoratives de la déportation et de la libération des camps. Il s'est exprimé en faveur du maintien du 5 décembre, date de l'inauguration du Mémorial dédié aux combattants d'Afrique du Nord. Toutefois, il comprend que certaines associations souhaitent célébrer le 19 mars et se porte garant du bon déroulement des commémorations. Monsieur le ministre, vous m'avez informé que des instructions seraient données aux représentants civils et militaires de l'État de façon à ce qu'ils se joignent aux cérémonies. Je vous en remercie (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe NC ; protestations sur les bancs du groupe GDR

M. Alain Néri (Src)

En ce qui concerne les orphelins S’agissant enfin de la mémoire, je sais, Monsieur le ministre, qu’avec beaucoup de courage vous avez personnellement considéré, comme nous, que la seule date symbolique qui convenait pour se souvenir des victimes de la guerre d’Algérie était le 19 mars, jour du cessez-le-feu.

M. Christian Vanneste.

Et du massacre des harkis !

M. Alain Néri

De même que le 8 mai 1945 n’est pas la fin de la guerre, mais le jour de la capitulation nazie, et de même que le 11 novembre 1918 est celui de l’armistice ; et je salue votre initiative de demander la présence des autorités militaires et civiles. En revanche, il conviendra de rappeler aux préfets qu’ils doivent respecter les lois de la République : le 5 décembre, il n’est prévu qu’une manifestation nationale et une manifestation départementale ; il est incorrect d’écrire aux maires pour leur dire d’organiser des manifestations communales ce jour-là.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur pour avis

 Nos 36 000 communes font partie de la République !

M. Jean-Christophe Lagarde  Nouveau centre C’est un sentiment d’amertume qu’ont éprouvé les anciens combattants à la lecture de ce premier budget de la législature

Un mot enfin sur les dates de commémoration : une écrasante majorité d’anciens combattants ayant servi en Afrique du Nord demande que la date du 19 mars remplace celle du 5 décembre, retenue en 2003 alors qu’elle ne correspond à aucun événement précis. La transmission de la mémoire repose pourtant sur les commémorations, qui doivent rassembler au lieu de diviser. Le 5 décembre est une date farfelue, probablement choisie au hasard dans le calendrier.

M. Alain Néri  C’était un trou dans l’agenda de Jacques Chirac !

M. Jean-Christophe Lagarde

Pourquoi ne pas choisir le 19 mars, jour où le cessez-le-feu est intervenu, même si bien des exactions ont ensuite été commises ma propre famille en sait quelque chose. C’est la seule date qui vaille, car c’est celle qui sera retenue par les livres d’histoire.

M. François Rochebloine Très juste !

M. Jean-Christophe Lagarde 

J’aimerais connaître votre position sur cette question, Monsieur le ministre, ainsi que sur la participation des représentants de l’État aux commémorations. Il me semble que l’on pourrait au moins l’autoriser, comme c’était le cas, voilà quelques années

M. Georges Fenech  UMP

S’agissant de la commémoration de la fin de la guerre d’Algérie, qui a si longtemps divisé le monde combattant, je salue la volonté actuelle de consensus en mon nom et en celui de mon collègue Remiller, député-maire de Vienne. J’ai moi-même pris l’engagement d’oeuvrer en faveur d’une solution d’apaisement, et je vous ai écrit à ce sujet, monsieur le ministre. Nous ne serons sans doute pas suivis en ce sens sur tous les bancs, mais nous ne pouvons rester insensibles aux arguments de certaines associations. J’espère notamment que vous donnerez instruction aux représentants civils et militaires de ce pays de se joindre aux commémorations du 19 mars prochain.

M. François Rochebloine

Très bien !

M. Georges Fenech

Ma famille a également traversé des épreuves douloureuses après le 19 mars. Mais force est de reconnaître que c’est la date du cessez-le-feu ! Que ceux qui ont survécu se rappellent, ce jour-là, ceux qui sont tombés au champ d’honneur.
Ne pensez-vous pas que le moment est venu d’envisager une date unique pour commémorer tous ceux qui sont morts, au cours du XXe siècle, pour la France ?
 Alors que nous nous apprêtons à célébrer le 90e anniversaire du 11 novembre 1918, pourquoi ne pas nous interroger sur le sens de ces jours de recueillement ?

M. François Rochebloine  ( nouveau centre )

Une majorité de Français retient aujourd'hui la date du 19 mars, qui tend à s'imposer dans la conscience nationale comme la seule date historique. Je ne porte aucun jugement sur les événements et refuse de participer à des polémiques indignes au regard des 30 000 soldats tués et des 300 000 soldats blessés lors des combats en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Ne confondons pas commémoration et célébration ! Il ne s'agit pas de consacrer la victoire des uns ou la défaite des autres. Le 19 mars 1962 a vu la proclamation d'un cessez-le-feu en Algérie à la suite des accords d'Évian, approuvés à 90,71 % par le peuple français lors du référendum du 8 avril 1962.
Une cérémonie commémorative doit d'abord servir la paix par des rassemblements dignes et recueillis devant les monuments aux morts ou les plaques commémoratives de nos villes et villages de France. Au-delà des anciens combattants, j'ai une pensée particulière pour les appelés du contingent : la date du 19 mars appartient à notre peuple – mon ami Georges Colombier, qui se trouvait en Algérie à cette date, ne dira pas le contraire – à notre histoire et à tous ceux qui chérissent la paix. Nous avons un devoir de mémoire à remplir, dans le respect des convictions individuelles de nos concitoyens. Je sais, monsieur le ministre, que vous porterez une attention bienveillante à cette question, ayant vous-même déposé en 2000 et 2003 une proposition de loi tendant à reconnaître le 19 mars comme date officielle de la fin de la guerre d'Algérie. Une nouvelle fois, je dénonce la date du 5 décembre, qui ne correspond à rien et ne peut donc servir le travail de mémoire que nous entendons conduire en direction de la jeunesse.

M. André Wojciechowski  (Ump)

Troisième volet, le travail de mémoire mais pas n'importe lequel. Il faut rompre tant avec la commémoration aiguë qui a saisi notre société depuis deux décennies qu'avec la repentance. Nous voulons d’abord une mémoire de l'intégration. Les premières années du conflit ont été marquées par un exceptionnel engagement des étrangers dans les armées françaises : combattants polonais, réfugiés juifs, républicains espagnols, engagés d'abord contre l'envahisseur puis dans la Résistance. Ces combats et ces hommes sont des symboles nécessaires à notre politique d'intégration. Il faut ensuite une mémoire partagée. La mémoire franco-africaine oscille entre deux tendances, la repentance coloniale et la mise en valeur des racines musulmanes : il est nécessaire de rompre avec les deux. Si le film Indigènes a fait naître une réflexion salutaire, il n'a pas vocation à écrire l'histoire. Si l'inauguration par Jacques Chirac d'un Mémorial musulman à Verdun en 2006 a été approuvée par l'opinion publique, je ne suis pas sûr que la transformation de tous les combattants africains en authentiques musulmans soit conforme à la vérité historique. Il est aujourd’hui essentiel de construire une histoire partagée entre les différentes nations africaines et la France. Pourquoi ne pas faire flotter tous les 11 novembre et 8 mai dans nos nécropoles nationales les drapeaux des pays des combattants tués au combat ? La mémoire partagée peut être un outil de la grande politique méditerranéenne qu’entend lancer le Président de la République.

Alain Marleix, secrétaire d’État

La politique de mémoire est aujourd'hui à la croisée des chemins, en raison de la disparition progressive des acteurs et témoins, et de l'éloignement dans le temps de ces événements. La mémoire doit être mieux défendue et s'adapter aux évolutions de notre société, tant dans son expression que dans son public. Je veux une politique de mémoire assumée, comme j'ai pu le dire lors de mon premier déplacement en Algérie.
C'est pourquoi je serai extrêmement vigilant quant à la mission même que nous donnerons à la Fondation pour la mémoire de la Guerre d'Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc, dotée de 3 millions d’euros en 2008. Cette politique ne doit pas nous conduire à la confrontation des mémoires, mais à la réconciliation (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe NC et du groupe UMP). La mémoire ne doit pas être ce qui nous oppose, mais ce qui nous rassemble. Près de 45 ans après les faits, il est de notre responsabilité d'en appeler à la concorde et de rendre hommage à toutes les victimes de cette guerre.
C'est la raison pour laquelle je ne veux pas non plus d'une politique de mémoire qui devienne l'antichambre de la tyrannie de la pénitence.
 Dans ce cadre, l'entretien du patrimoine fait l'objet d’importantes mesures nouvelles. Plusieurs grands projets seront concrétisés : ils concernent le cimetière de Thessalonique, le cimetière marin de Mers el Kébir, la nécropole du Petit Lac d'Oran, la nécropole de Gammarth en Tunisie… Je remercie les autorités locales pour leur soutien. D’autres projets concernent la restauration du site de Notre Dame de Lorette, la mise en valeur du Mont Valérien, la modernisation du Mémorial du Mont Faron, l'historial Charles de Gaulle aux Invalides.
Mais au-delà de l'entretien du patrimoine, il faut s'interroger sur le sens à donner à cette politique de mémoire. Aussi ai-je décidé de créer deux commissions. La première, présidée par le professeur Jean-Jacques Becker, réfléchira au sens à donner aux commémorations du 11 novembre 2008, quatre-vingt dix ans après le retour de la paix en Europe et l’émergence de nouveaux États, aujourd'hui membres de l'Union européenne. Cet anniversaire se présentera justement sous la présidence française de l’Union. La seconde commission, présidée par André Kaspi, s’interrogera sur la façon de lutter contre le désintérêt de plus en plus manifeste pour ce passé en renouvelant la forme des commémorations. Je suis en effet convaincu qu’il est possible d’allier modernité et travail de mémoire.

Mme Françoise Olivier-Coupeau (Src)

Longtemps taboue, la reconnaissance de la guerre d'Algérie et des combats menés en Tunisie et au Maroc a rendu, en 1999, la parole à tous ceux qui souffraient encore d'un silence trop pesant. Nous avons ensuite institué une journée d'hommage national aux Harkis. Notre pays a officiellement commencé à assumer cette période douloureuse et souvent peu glorieuse, qui appartient à notre histoire collective.
Ce travail de reconnaissance était nécessaire, mais il ne suffit pas. Certains peinent encore à trouver l'apaisement, et sont choqués par le choix du 5 décembre. Dépourvue de fondement historique, cette date ne correspond à rien dans notre mémoire. Comment pourrait-elle donc être associée au recueillement et au souvenir ?
J'en appelle, Monsieur le ministre, à la tradition républicaine qui veut qu'une date commémorative s'appuie sur une date historique marquant la cessation officielle des hostilités, sinon la fin des combats eux mêmes. C’est le 19 mars que nous devons choisir, date du cessez-le-feu officiel, à la suite des accords d'Évian. Ce choix ne porterait pas outrage, monsieur le ministre, aux victimes nombreuses d’actes postérieurs. C’est une simple question de vérité historique. Le remplacement de la célébration du 5 décembre n’aurait en outre rien d’une décision politicienne, puisque c’est un souhait partagé sur de nombreux bancs. Notre seul but est de permettre aux combattants de la troisième génération du feu, qui se sont battus pour leur pays, d'effectuer un travail de deuil et de mémoire serein.
Soyez sûr, monsieur le ministre, que nous reviendrons à la charge tant que justice n’aura pas été rendue. Entendez-vous enfin engager un débat national afin que l’on parvienne à s’accorder sur la date de la commémoration ? En attendant cet apaisement de la mémoire, donnerez-vous satisfaction aux associations qui vous demandent de donner instruction aux autorités civiles et militaires de participer aux cérémonies du 19 mars dès l’année prochaine ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Alain Marleix, secrétaire d’État.

 La journée nationale de commémoration des harkis est un succès. Pour y avoir participé aux Invalides en compagnie du Premier ministre, j’ai constaté qu’il y avait beaucoup de monde. Cette célébration a également eu lieu dans la plupart des villes, même si elles ne comptent pas de harkis. Une véritable marque de respect a donc été témoignée envers cette catégorie de citoyens.
J’ajoute qu’un « mur des disparus » sera inauguré le 25 novembre prochain à Perpignan, à l’initiative de la municipalité. Y figureront, sans discrimination d’aucune sorte, toutes les victimes appartenant aux différentes communautés qui vivaient en Algérie.
Nous avons également chargé M. Kaspi, dont chacun reconnaît l’autorité en matière historique, de présider une commission chargée de formuler des propositions au sujet des dates et de la participation de nouveaux publics aux commémorations historiques.
Faut-il pérenniser toutes les manifestations publiques actuelles, ou bien regrouper certaines d’entre elles ? J’espère que le travail de la commission Kaspi permettra d’assurer le devoir de mémoire et le passage de témoin aux jeunes générations, qui garantissent la cohésion de la nation et auxquels le Gouvernement est donc particulièrement attaché.
S’agissant des dates commémoratives, je ne me déroberai pas à vos questions : le Président de la République souhaite le maintien de la date du 5 décembre, comme le veut la loi (« Non, c’était un décret ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR), à la suite, en effet, d’un décret-loi.

M. Alain Néri  Nous avons transmis au Sénat une proposition de loi à ce sujet !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État.

Oui, mais la fin de la législature l’a rendue caduque : il faut donc en déposer une nouvelle.
Le Président de la République a précisé qu’il s’agissait d’un hommage aux personnes, et non de la commémoration d’un événement, les associations demeurant libres de consacrer à celle-ci, dès lors que l’événement en est digne, la date de leur choix  par exemple celle du 19 mars, auquel cas les autorités civiles et militaires en assureront, sauf circonstances locales particulières, le bon déroulement. Une circulaire précise le rôle des préfets, que je souhaite clarifier afin de faciliter cette commémoration.
M. François Rochebloine  Très bien !
M. Régis Juanico  Les préfets seront là !