Charles MUNCK

Décédé en février 1960 à l’âge de 82 ans à BONE, Charles MUNCK fut salué unanimement. Avec lui disparaissait une des plus brillantes personnalités d’ALGÉRIE.
Cet alsacien qui, pendant son service militaire en Algérie, avait entrevu l’expansion future de la province française eut bientôt l’occasion d’y revenir et de s’y installer pour toujours. Après son mariage en 1902 à Paris avec Thérèse VERGELOT, fille de négociant en vin, MUNCK accepta l’année suivante de prendre en main la propriété acquise par son beau-père dans la plaine de la SEYBOUSE. Ce domaine vinicole nommé « MOUMNA » faisait face au village de DUVIVIER, à 60 kilomètres de BONE. Séduit par la région, il fut l’un des premiers à comprendre tout le parti que petits et moyens agriculteurs pourraient tirer de leur union au sein de coopératives et associations mutualistes. Il se mit alors à associer dans un commun effort, toutes les communautés et il multiplia dans la région bônoise toutes les formes de coopération.

 
     
 
Charles Munck
président de la caisse
Centrale Mutualité Sociale Agricole
 
 
 
Avec messieurs BENYACOUB , SAUNIER et SERDA, il fut le créateur de la première coopérative de tabac ( la TABACOOP) au lendemain de la guerre 14-18. Il contribua à son essor avec dans son sillage, la TOMACOOP, le COTOCOOP puis l’OLEOCOOP etc.…. Cet ensemble unique en France fut cité en exemple dans le grand hebdomadaire : « La Vie Française » . Organisateur audacieux à l’esprit pionnier, Charles MUNCK fut également un grand réalisateur . L’homme s’intéressait autant aux produits transformés : tabacs, coton, soja…. qu ‘au produit tout court. La commercialisation de l’agriculture, sa modernisation, l’industrialisation le retenaient au premier chef. Bien avant le plan de Constantine, il avait mis en valeur la plaine de BONE.
Des décennies durant, ce travailleur acharné restera le « grand patron » de cette région. Jusqu’à sa mort, il portera à bout de bras la puissance agricole de l’Est Algérien. Sa clairvoyance en fit l’introducteur de la culture du coton dès que la vente du tabac commença à s’infléchir. Par son action, il fit la richesse d’innombrables exploitants. A partir de 1933, les docks d’HIPPONE près de BONE, cités partout en exemple, firent à longueur d’années le plein de visiteurs : hôtes illustres, techniciens français et étrangers ou simplement touristes curieux venus pour humer le tabac, palper le coton, ou goûter la tomate à travers le labyrinthe de hangars, caves , salles et couloirs. On s’extasiait à juste raison devant ces exceptionnelles réalisations. Il relança la foire de BONE en 1947. La TABACOOP, puissante, pouvait subventionner le club omnisports de la J.B.A.C ( Jeunesse Bônoise Athletic Club) ; ses intérêts se trouvaient fort bien défendus par le quotidien « La Dépêche de l’Est » crée et dirigé par Charles MUNCK qu’assistait Jules MAUREL.
 
 
 
Au regard d’un tel bilan, on comprendra le geste du Président de la République Vincent Auriol, en visite à BONE et sa région en juin 1949 : Charles MUNCK recevra La Grand Croix de la Légion d’Honneur ; le Conseil de l’Ordre étant mis devant le fait accompli.
L’œuvre considérable de MUNCK trouva son couronnement avec le barrage de la CHEFFIA sur l’Oued BOU NAMOUSSA. Après une lutte qui dura vingt ans, c’était l’enrichissement garanti pour une région que cet homme avait déjà fertilisée. L’ouvrage, qui fut commencé le 4 octobre 1960, comportait une digue de 640 mètres d’un hauteur de 51 mètres. La capacité de retenue d’eau s’élevant à 158 millions de mètres cubes. Parvenu au plus haut niveau par son sens du social et de l’humain MUNCK accumula les charges et les responsabilités auxquelles le portèrent la confiance, sans cesse renouvelée, de toute une population
     
 
 
Charles Munck
par Hans Kleiss.
 
 
 
Son activité débordante, guidée par sa vive intelligence, et son autorité incontestée furent autant appréciées au plan local que dans l’Algérie toute entière. Président pour la région bônoise des Associations Agricoles, de la Chambre d’Agriculture, de la TABACOOP, de la Caisse de Crédit Agricole etc…., il fut aussi Délégué Financier , membre de l’Assemblée Algérienne, Président de l’OFALAC ( Office Algérien d’Action Economique et Touristique), de la coopérative cotonnière d’ALGÉRIE, de la Fédération des TABACOOPS etc. ….
En 1949, retraçant l’évolution du mouvement coopératif agricole en ALGERIE dont il fut le leader, ce terrien magnifique concluait : « N’oublions pas que la coopération , grâce à laquelle il est possible de généraliser rapidement les méthodes d’exploitation perfectionnées, génératrices de rendement, grâce à laquelle aussi tous les éléments ethniques de nos campagnes algériennes trouvent un terrain de collaboration fraternelle, constitue un facteur singulièrement efficace de prospérité économique et de paix sociale ».
John Franklin
     
   
 
   
     
  Bibliographie :

Algéria, n°6 . – Mai 1949. – La coopérative agricole en Algérie par Ch. Munk.
N°12.- janvier 1950
Atlas de la Mutualité Agricole en Afrique du Nord : 1907-1947 et 1907-1957. – Alger : Ed. Baconnier .
L’Echo d’Ager . – 17 février 1961.
La dépêche quotidienne d’Algérie.- 28 décembre 1961.
Magazine de l’Afrique du Nord, n°6. – 1949. – Le barrage de Bounamoussa.
Péroni, Jean. – Bône tu te rapelles ?. - 1973

 
     
 
Barrage de Bou Namoussa