C'est au 25, rue Clauzel à Alger que Paul Belmondo le sculpteur Algérois vit le jour le 8 août 1898 son histoire, un article du magazine N° 19 de "Mémoire Vive" du C.D.H.A


 


Paul Belmondo

C’est au 25, rue Clauzel à Mustapha, ville alors en pleine expansion qui sera rattachée en 1904 à Alger, que Paul Belmondo vit le jour le 8 août 1898. Ses parents d'origines piémontaise et sicilienne, modestes et probes, l'élevèrent avec son frère Antoine dans cet appartement qu'ils occupèrent jusqu'à la fin de leurs vies au milieu des années cinquante. Passionné de dessin dès son plus jeune âge, Paul, né avec le don sculptural, façonna une tête de bouledogue dans un caillou avec des outils fabriqués par son frère. Il avait 13 ans à peine. Pendant 4 ans il suivit à l'Ecole des Beaux-Arts d'Alger les cours d'architecture dispensés par Monsieur Gabriel Darbéda. Il dira plus tard avoir tiré grand profit de ces cours «qui lui permirent d'établir l'accord nécessaire de la sculpture à la construction qu'elle doit orner.» Le soir, le jeune homme fréquentait assidûment les cours de modelage du professeur Georges Beguet. Lorsque la Grande guerre survint, Belmondo, très tôt recensé, partit se battre en France. Blessé lors de la bataille de Saint-Mihiel, près de Verdun, il dut être évacué. Plus tard une mutation comme dessinateur du Génie lui offrit l'occasion de découvrir les merveilles du Musée de Naples. Dès son retour à Alger, Belmondo reprit ses études. Il fut reçut premier à la Bourse de l'Algérie en 1921, puis à l'Ecole des Arts décoratifs et put partir pour l'Ecole des Beaux-Arts de Paris avec son ami Félix Fredouille.




Paul Belmondo dans son atelier
Logé dans un petit hôtel, au 19 rue Dauphine, Belmondo ne perdit pas son temps. Il dessinait aux Antiques ou d'après un modèle vivant le matin puis s'exerçait à la taille de la pierre l'après-midi. En soirée, quand il n'étudiait pas à la bibliothèque de l'Ecole, il dessinait dans les Académies. Il fit la connaissance de Georges Courteline qui, ayant apprécié son sens du dessin lui confia l'illustration de «Boubouroche» (Paris, Société littéraire de France, 1921). Paul qui venait souvent sculpter dans l'atelier de Georges Halbout à Montparnasse y rencontra un jour Charles Despiau passé en voisin. Le maître remarqua un buste sur lequel le jeune homme travaillait. Il examina l'objet cinq longues minutes pendant lesquelles Belmondo n'osa plus respirer. Quand le Maître s'exprima sur les qualités de l'ouvrage, ses appréciations furent telles que Paul partit en courant comme un fou dans les rues de Paris. Il pleurait de joie. Par la suite il revit très souvent Despiau qui lui prodigua d'avisés conseils tout au long de leurs promenades au Parc Montsouris. Grâce à son talent sincère et authentique et à force d'un travail acharné le jeune artiste algérois ne tarda pas à se faire connaître et apprécier. Dès 1926 il obtint une médaille de bronze pour une «Eve» exposée aux Artistes français, puis un bas-relief «Le retour des athlètes» fut honoré d'une médaille d'argent. Paul était encore étudiant quand il se présenta au concours américain Florence Blumenthal «pour la pensée de l'Art français.» Il l'emporta d'emblée et put, grâce aux 20.000 F gagnés, non seulement poursuivre ses études mais également s'offrir un voyage en Grèce avec un de ses amis, le sculpteur Joffre. Ebloui par le Musée de Delphes il y passa toute une nuit en s'éclairant à la bougie et en faisant jouer la lumière tout autour des statues.

 

 

 



L'Apollon de 1933.

 

 


Buste de Mme Jeanne Alazard

C'est en Grèce, dira-t-il plus tard, qu'il put étudier l'école des bronziers. Belmondo visita également Olympie, Athènes avec l'Acropole et le Cap Sumnium. Ce dernier paysage l'émut tout particulièrement. Belmondo obtint ensuite un prix au concours international Bolivar (projet de monument pour ce général) et le 2e prix pour son projet du monument du Centenaire à Boufarik. Il se mit dès lors à exposer régulièrement aux Tuileries. Son «Apollon» et son «Buste de jeune homme», reçurent un accueil chaleureux de la critique. Belmondo qui avait toujours eu pour modèle le grand sculpteur Carpeaux n'allait plus cesser de donner des chefs d'œuvre, excellant dans toutes les disciplines de son métier, de la médaille à la sculpture monumentale. Très fin dessinateur, Belmondo, qui aimait se rappeler souvent le conseil de Donatello: «Je peux vous enseigner d'un seul mot tout l'art de la sculpture: dessiner!», s'était révélé dès ses premiers travaux comme un statuaire et un bustier dans l'esprit gréco-latin. Abordant tous les genres, au cours de sa longue carrière, du sacré au profane, avec une maîtrise égale, il fut un très grand artiste classique.
En 1930, après avoir rencontré à Paris la compagne de sa vie, il se maria. Affectueux et toujours souriant il revint régulièrement à Alger voir ses parents et son frère. Ses nombreux amis cherchaient bien à le retenir mais Belmondo qui marchait sur la trace des plus grands, tels Bourdelle et Maillot, avait désormais son avenir à Paris. En 1932, il obtint le Grand Prix Artistique de l'Algérie. Il présenta une statue de femme, qui décora ensuite le hall de la Salle Pierre Bordes à Alger, le buste de son père et un buste de jeune homme qui sera acquis par le Musée d'Alger. Un peu plus tard Belmondo exécuta un bas-relief de 7 mètres 50 sur 4 mètres pour orner le Foyer civique d'Alger. Pour se consacrer à cette importante œuvre: «L'Algérie recevant les fruits du travail» il refusa la commande d'une statue pour la Gare de Caen. Il revint dans sa ville natale pour y diriger la taille de la pierre et la finition après avoir exécuté les moulages à Paris. Les commandes se mirent à affluer et Paul multiplia les magnifiques œuvres qu'on peut aujourd'hui admirer à travers la France. Au sommet de son art il recevra jusqu'à la fin de sa vie les plus grandes récompenses ainsi que les honneurs les plus mérités. Une exposition des œuvres de Paul Belmondo circule actuellement dans certaines villes de France. Elle est visible jusqu'au 29 septembre au Palais Bénédictine de Fécamp puis aux Beaux-Arts de Niort et au Musée Richard Anacréon de Granville. C'est là une exceptionnelle occasion d'admirer ses œuvres avant qu'un Musée Belmondo, depuis si longtemps attendu, ne voit enfin le jour.
John Franklin.

Bibliographie.CDHA.

ANGELI L-E. - Le sculpteur Belmondo. In : La Dépêche d'Algérie 14,15 et 16 novembre 1961.
ROSTAGNY, René - Un artiste algérois de renommée mondiale In L'Echo d'Alger. 1951.
RANDAU, Robert. ? Un artiste sculpteur d'Algérie.
Belmondo In L'Afrique du Nord illustrée, 1934, n°7I2.
PRAT, Véronique. Paul Belmondo. In Le Figaro magazine, 13 juillet 2002, n°1133.
Paul Belmondo In L'Algérienne, 1 octobre 1951.
DEMYRA, Lyse .La vie artistique In. L'Edile algérien janvier 1957, n° 97
ARNAUDIES, Fernand. ? Quatre sculpteurs Nord africains : Belmondo, Wacquiez, Damboise, Granados, In Le magazine de l'Afrique du nord, 1949, n°4.


L'Algérie recevant les fruits du Travail , bas relief pour
le" Foyer Civique" du Champ de Manoeuvre à Alger.